#GrâceÀToi: Une ribambelle de remerciements

Source de référence quant à l’importance du développement des jeunes enfants, Naître et grandir qui regroupe un site Web, un magazine et une campagne sociétale, a lancé dans le cadre de sa 9e édition, une nouvelle campagne visant à souligner l’impact que nous, en tant qu’adultes, pouvons jouer dans la vie des jeunes. C’est en lien avec cette campagne qu’une plateforme Web interactive a été développée afin d’inviter la communauté à remercier en quelques clics ceux et celles qui ont été significatifs pendant leur enfance. À l’aide d’une ribambelle pour rendre hommage à ces gens, des dizaines de témoignages ont déjà été affichés sur le site. La campagne grâce à toi de Naître et grandir c’est l’occasion de remercier ces personnes qui ont fait une différence lorsque nous étions enfant. C’est le moment de dire merci pour la première fois, ou une fois de plus, à celui ou celle sans qui notre vie n’aurait pas pris un certain chemin.  

Lorsqu’on me demande de parler d’un adulte qui a fait une différence dans ma vie lorsque j’étais plus jeune, il y a une personne qui me vient automatiquement en tête. Puis malgré tous les rires et les bons souvenirs portés à cette personne, je ne peux m’empêcher de vaciller dans l’émotif voire la tristesse et la douleur. Tristesse parce que cette personne nous a quittés beaucoup trop tôt, emportée par la maladie, et douleur parce que je n’ai jamais pu la remercier, jamais pu lui faire comprendre ce qu’elle avait fait basculer en moi à l’époque.

François Filion, ou comme on le nommait par souci d’autorité «Monsieur Filion», fut mon dernier prof de maths au secondaire. J’avais 16 ans et j’étais complètement perdue dans une dépression sévère qui me suivait depuis plus d’un an et qui a continué de faire rage sur moi pendant cinq ans. Malgré cela, j’étais une élève assidue et physiquement présente. Cependant, je me perdais rapidement dans mes idées noires. C’était une époque où je ne voyais pas le bout du tunnel et où j’avais l’impression que tout ce que j’avais vécu pesait si lourdement sur mes épaules qu’il était impossible pour moi d’avancer. Je culpabilisais pour des choses qu’un jeune ne devrait jamais avoir à subir et la douleur dans mon coeur était si stridente que la seule solution que j’avais trouvée était de me faire mal. C’était comme un cercle vicieux qui ne s’arrêtait jamais et qui m’a suivi beaucoup trop longtemps. À ce moment, mon entourage n’avait pas été capable de déceler la peine qui grandissait en moi et aucune aide ne m’avait été offerte.

Puis un jour plus sombre, plus triste où beaucoup de choses ont basculé, je me suis assise dans le couloir les jambes trop molles pour me soutenir et j’ai pleuré. J’ai pleuré seule et en silence parce que les cours étaient finis, et qu’il n’y avait personne pour être témoin de mes sanglots. Puis je me souviens, François Filion est arrivé et m’a littéralement tendu la main pour m’aider à me relever. Je me souviens encore de sa drôle de tuque et de son regard rassurant. Je me suis levée et je l’ai suivi dans les couloirs vides de l’école. En silence, il m’a mené chez la psychologue.

Ce fut mon premier contact à vie avec une psychologue et la première d’une série de visites. Ce fut le moment qui démystifia complètement ce qui avait toujours été tabou. À l’époque, on m’avait carrément fait comprendre que c’était mal d’aller voir une psychologue et que c’était preuve de lâcheté. Ce fut à cet instant qu’une nouvelle porte, un nouveau chemin, s’installa devant moi, car quelqu’un m’avait proposé son aide sincèrement et sans arrières pensées. Quelqu’un avait su voir la détresse dans mon regard et surtout, quelqu’un y avait vu de l’importance et s’y était attardé. Cette attention fut d’une telle importance qu’elle me marqua fortement et me fit réaliser  pour la première fois depuis longtemps qu’il n’y avait pas que du mauvais dans cette vie. Monsieur Filion fut la première petite lumière au bout du tunnel, une lueur que je n’avais pas vue depuis des mois.

Alors même si je n’ai pas eu le courage de me rendre à ses funérailles et que je l’ai regretté, même si son entourage n’a aucune idée de qui je suis ni même indice de mon existence, même s’il n’a jamais eu conscience de ce qu’il a fait pour moi, je peux affirmer qu’en partie grâce à lui, je suis celle que je regarde dans le miroir chaque matin et j’espère du fond de mon coeur que cette histoire puisse faire perdurer sa mémoire un peu plus dans le temps.

Monsieur Filion, j’étais perdue et je ne savais pas que tu partirais si vite et alors que j’étais trop gênée pour aller te voir et te remercier, tu t’es éteint et as laissé plusieurs personnes en deuil. Sache cependant que tu m’as enseigné ta matière plutôt que de m’évaluer sur ce que je n’avais pas appris, car tu croyais fermement en ce que tu faisais quotidiennement. Tu avais une vraie vocation et tu me l’as prouvé à maintes reprises. Mais surtout, tu m’as fait rire, tu m’as fait pleurer, tu ne m’as pas jugée et tu m’as tendu une main que je ne trouvais nulle part ailleurs. Tu as détruit tous les préjugés que j’avais et tu as été la première aide sincère que j’ai ressentie. Merci. Merci mille fois d’avoir été la personne adorable que tu étais et surtout merci d’avoir été là pour cette adolescente à qui tu ne devais rien.

Parler de quelqu’un qui a changé notre vie positivement, c’est sûrement une des plus belles façons de remercier celle-ci. Réaliser à quel point cette personne a fait une différence peut prendre plusieurs années, voire toute une vie, mais lorsque ça arrive, ça réchauffe le coeur au plus haut point et ça ne nous quitte jamais. Je vous invite à remercier ces personnes qui vous ont marqué, à écrire sur eux sur les réseaux sociaux et à vous joindre à la ribambelle de Naître et grandir.

Merci encore.

#GrâceÀToi #YouMadeTheDifference

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Nancy Esperanza

Rédactrice en chef pour Boucle Magazine depuis 2018, Nancy assure une ligne éditoriale lifestyle du blogue en partageant son amour pour les petits plaisirs de la vie. On la reconnaît par son rire contagieux et sa grande sensibilité.

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